Roq and Rob
Roquebrune-Cap-Martin, France, 1949
© FLC/ADAGP
INFOS PRATIQUES
Projet non réalisé
Ces études sont dominées par un souci de composition de l’architecture avec le site si particulièrement éloquent de la Côte d’Azur. Ce site a été abîmé, en ce dernier demi-siècle, parla prolifération de maisons de tous styles et d’un urbanisme défaillant. La Côte d’Azur, polluée de maisonnettes, a son paysage menacé. Le Corbusier recherchait une voie logique: il raisonna ainsi: pourquoi construire à la Côte d’Azur ? Pour avoir le bénéfice de son climat et de ses vues admirables. II s’agit donc, en premier lieu, d’assurer la visibilité – la vue-sur les paysages les plus choisis. Tel est l’objet même du logis à construire. II s’agit ensuite de sauvegarder les choses qui seront vues et par conséquent de ne pas troubler le site en l’encombrant de bâtisses en désordre. Au contraire, il faut constituer par un urbanisme sage des réserves de nature et de créer de toutes pièces des sites architecturaux, des événements architecturaux de haute valeur plastique. L’examen des anciennes petites villes qui occupent les hauteurs de la côte fournit une information excellente; le site architectural y est fait de maisons toutes accolées les unes aux autres, mais dont les yeux (les fenêtres) ouvrent tous sur l’horizon infini. Le paysage contigu est demeuré libre, consacré à l’agriculture ou constituant simplement des réserves naturelles.
Les pentes offrent d’elles-mêmes la solution: la coupe assure les vues; les formes du logis se prêtent également à une exploitation favorable. II s’agit très particulièrement de logis en grande profondeur et étroits, telle que l’Unité d’Habitation de Marseille en a fourni l’éloquente démonstration.
Le brevet de Le Corbusier dénommé le 226 x 226 x 226, conséquence du Modulor, réalise un volume habitable alvéolaire plein de ressources. Ces volumes alvéolaires créent des espaces libres, pouvant être exploités avec une grande liberté pour l’habitation. Le principe de ce brevet consiste en une seule cornière appliquée pour toute la construction. Celle-ci peut atteindre deux ou trois étages. Les tôles cornières, soudées à l’électricité par un procédé spécial, constituent en fin de compte une espèce de structure solidaire de la nature des radiolaires.
Les figures de la seconde étude “Roq” représentent une “hôtellerie en croûte”, formée d’alvéoles habitables répondant à quantités de besoins hôteliers, à tout un programme hôtelier diversifié. Hôtel de villégiature d’une forme nouvelle, à pavillons séparés; les corridors se trouvent remplacés par les “planches” (couvertes de citronniers) qui constituent l’immense gradin du terrain envisagé (les “planches” sont des terrains de cultures en gradin profonds, longs de 3, 4 ou 5 mètres et larges de 20, 30 ou 50 mètres, selon l’usage méditerranéen). La coupe révèle l’application du volume alvéolaire sur le terrain en gradin situé au-dessous de la vieille petite ville de Roquebrune.
Terrain admis comme inemployable, presqu’à pic sur la mer, très mal desservi par un simple sentier de douanier. Mais le volume habitable peut très bien être “inventé” précisément en fonction de la pente abrupte qui descend à la mer.
Les études de “Rob” se sont poursuivies, basées tantôt sur une technicité, tantôt sur une autre, à la recherche d’un type d’habitation et d’exploitation de l’habitation sur les rives de la Côte d’Azur, capable de s’insérer dans le paysage et propre à le vitaliser.
C’est l’une des premières recherches conçues en tôle d’aluminium pliée, la toiture voûtée étant recouverte de béton, de terre et de plantes grasses.
Extrait de Le Corbusier, Oeuvre complète, volume 5, 1946-1952