Maisons en série pour artisans
Sans lieu, 1924
© FLC/ADAGP
Dans sa quête perpétuelle d’établir des logements en série, Le Corbusier projetait de loger des artisans dans un grand atelier très éclairé. Comme pour tous ces logements en série l’enjeu est pour Le Corbusier d’obtenir le coût de fabrication le plus bas. Il réduit donc les surfaces, la hauteur des chambres et se contente de deux portes ; exercice difficile car il doit préserver la lumière. Tout repose donc sur l’aménagement de l’espace et le traitement de la verticalité – mur libre de 7m X 4,50m. Le plan matérialise ce que Le Corbusier appelle « la diagonale de la soupente » qui permet de créer « une dimension inattendue ».
Cette habitation est pourvue de murs en « solomite » (paille compressée maintenue par un treillage en fils de fer) recouverts de ciment à l’extérieur et de plâtre à l’intérieur. Ce matériau, issu d’une technologie récente (créé aux alentours de 1923), avait pour objet de proposer une bonne isolation thermique et phonique à moindre coût. Ces plaques préfabriquées servirent de nombreuses fois : Pavillon de l’Esprit Nouveau, Pavillon Suisse… mais ne servirent pas pour ce projet à but théorique que Le Corbusier n’eut pas le loisir d’imposer sur le marché immobilier.
Le problème: loger des artisans dans un grand atelier (mur libre de 7 m x 4 m 50) très éclairé. Diminuer la dépense en supprimant les cloisons et les portes, en réduisant par un jeu d’architecture, les surfaces et les hauteurs habituelles des chambres. La maison porte sur une colonne unique, évidée, en ciment armé. Murs isothermiques. Dans toute la maison, 2 portes. La soupente en diagonale permet au plafond de se développer dans son entier (7 m x 7 m) ; le mur aussi montre ses dimensions les plus grandes et, de plus, on crée par la diagonale de la soupente une dimension inattendue: cette petite maison de 7 mètres impose à l’œil un élément capital de 10 mètres de long.
Extrait de Le Corbusier et Pierre Jeanneret, Oeuvre complète, volume1, 1910-1929