Villa Schwob ou Villa Turque
La Chaux-de-Fonds, Suisse, 1916-1917
La commande
En juillet 1916, Anatole Schwob, propriétaire des montres Cyma, demande à Charles-Edouard Jeanneret, pas encore connu sous le nom de Le Corbusier, de lui construire une maison d’habitation sur un terrain situé non loin du centre-ville de La Chaux-de-Fonds. Les deux hommes se connaissent depuis 1914, année où Charles-Edouard Jeanneret réalise la décoration intérieure d’un fumoir et d’un salon pour le compte d’Anatole Schwob. Les études débutent à l’été 1916. Le chantier se termine en septembre 1917.
Le projet
Située sur le haut d’un terrain en pente entouré de murs, la maison se compose d’un bloc central carré prolongé de chaque côté par des avancées en demi-cercle. De part et d’autre de la maison sont construits un bâtiment pour la cuisine et une pergola. Le Corbusier élabore cette construction selon le principe de la maison Dom-Ino. L’ossature de la maison (dalles et poteaux) en béton armé permet à Le Corbusier d’exploiter le plan libre et la façade libre, deux notions qu’il théorise plus tard dans les cinq points de l’architecture nouvelle. Le Corbusier expérimente pour la première fois le toit plat ainsi que les tracés régulateurs sur les façades.
Le traitement des façades, recouvertes partiellement de briques ocre jaune, est différent selon le côté rue ou le côté jardin. Sur la rue, la façade est quasiment aveugle à l’exception de quatre œils-de-bœuf situés de part et d’autre d’un grand panneau vide. A l’inverse, la façade, donnant sur le jardin, est largement ouverte vers l’extérieur avec, en son centre, une grande baie vitrée qui court du rez-de-chaussée au premier étage. Sur cette façade, le deuxième étage est en retrait par rapport aux niveaux inférieurs, laissant ainsi place à un solarium et un jardin-terrasse délimité par une corniche.
Cet extérieur et son toit détonnent par rapport aux maisons construites à cette époque à la Chaux-de-Fonds et lui vaudront le surnom de « Maison Turque ».
La maison est sur trois niveaux et repose sur un sous-sol. Le rez-de-chaussée accueille le séjour à double hauteur, éclairé par l’immense baie vitrée. La salle à manger, la salle de jeux, la bibliothèque, un coin cheminé, le vestibule et l’office complètent ce niveau. Au premier étage, l’escalier donne sur une galerie qui surplombe le séjour et distribue l’ensemble des espaces de nuit. Le dernier étage est réservé aux chambres des domestiques.
En raison du dépassement du budget initial, les relations entre le commanditaire et l’architecte se tendent. Cela limite l’apport de Le Corbusier à l’aménagement intérieur de la maison. Néanmoins, il dessine un divan-lit. S’inspirant de la vue en plan de la maison, il réalise aussi un lustre pour le séjour et une niche peinte située en haut de celui-ci.
Le devenir de la villa
La Société Ebel rachète la maison en 1986. Deux restaurations majeures ont eu lieu, la première, en 1957-58 par l’architecte milanais Angelo Mangiarotti porte sur les intérieurs ; la seconde, globale, entre 1987-1988 est une restauration globale engagée par Ebel. L’aménagement intérieur est confié à Andrée Putman, architecte et designer française.
Classée au titre des monuments historiques en 1995, la Villa Schwob est la dernière œuvre chaux-de-fonnienne de Le Corbusier avant son installation à Paris.